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Mai-Ling

Publié par Kanata le 18 août 2012

Note

Les « textes à voix » comme leur nom l’indique, trouvent toute leur valeur lorsqu’ils sont parlés, et donc écoutés. Les liaisons, les élisions et leur rythme en général risquent de ne pas être retranscrits correctement par une simple lecture. C’est sans doute paradoxal pour un texte écrit, mais c’est aussi ce qui fait toute la force de la tradition orale et contée.

Description

Parce qu’ENFance et ENFer ont la  même racine, parce que je n’ai pas la même définition “d’évolué” que vous, parce qu’il y aura toujours des Mai-Ling…


 

J’ai pris un train ligne Z.
J’ai pris un train pas zen.
Direction la zone, la vraie.
C’est pas chez toi, c’est pas tout près.
Au terminus j’y retrouve nos patrons,
Loin de leur bureau et de leur maison.
Sortie Station Manille, ou quai Saïgon,
Mais eux sont venus en classe affaires, par avion.
Ils sont lâchés dans les bas quartiers,
Avec rien à commander, rien à gérer.
Dans leur agenda, il y a juste une adresse.
Ils cherchent sur leur plan cette maison pleine de promesses.

 

Moi ? J’étais venu pour oublier,
Ou je sais plus, peut-être pour me retrouver.
Eux ? Ils sont venus libérer leur stress,
À la recherche de narcotiques et de fesses.
Moi, en bateau, en train et à pied.
Je faisais le beau, le malin, je voyageais.
Eux, ils ont casé ça entre deux rendez-vous :
De 10 à 12, baiser une gamine pour quelques sous.
Moi, sur la route j’avais donné un peu d’argent
Pour qu’une famille n’ait pas à vendre son enfant.
Eux, avec leur penchant pervers et leurs dollars
Font perdurer ce trafic de salopards.

 

Mai-Ling tu t’occupais des cochons quand je t’ai vu.
Et malgré ta crasse et les haillons dont tu étais vêtu,
Tu avais encore l’espièglerie d’une gamine et la grâce d’un ange,
Et à tes parents j’ai versé le coût d’une carte orange,
Assez pour qu’ils puissent s’occuper de toi,
Assez pour qu’ils te gardent sous leur toit.
Mais quand je suis repassé dans ton canton,
Il n’y avait plus personne qui jouait avec les cochons.
Je n’ai pas eu besoin de demander ce que tu étais devenu,
Je savais qu’en ville, d’autres porcs jouaient avec ton corps nu.
Que même avec suffisamment d’argent,
Tu avais été vendue par tes propres parents.

 

J’aimerais dire que c’est inhumain.
Mais rendons-nous à l’évidence, il le faut bien,
Il n’y a en fait rien de plus humain,
Je connais pas d’autres mammifères qui prostituent leurs gamins.
Non, c’est le propre de l’homme tant de laideur,
Dans le règne animal, il n’y a pas de place pour cette horreur.
Prouvez-moi que j’ai tort s’il vous plait
Redonnez-moi espoir en notre espèce que je hais.
Donnez-moi de beaux arguments,
Que je puisse expliquer à Mai-Ling, dix ans,
Que si ses parents ont vendu son corps aux patrons,
Quelque part ça fait du sens, quelque part il y a une raison.

 

Indien et Dieu tue l’aura

Publié par Kanata le 5 mai 2011

Note

Les « textes à voix » comme leur nom l’indique, trouvent toute leur valeur lorsqu’ils sont parlés, et donc écoutés. Les liaisons, les élisions et leur rythme en général risquent de ne pas être retranscrits correctement par une simple lecture. C’est sans doute paradoxal pour un texte écrit, mais c’est aussi ce qui fait toute la force de la tradition orale et contée.

Description

Une désacralisation de la vision européenne des Amérindiens qui m’était venue déjà en tête en 1989 – ça ne rajeunit personne – lors d’un premier voyage au Québec. Mais finalement je l’ai écrit 20 ans plus tard en quittant Toronto.

 

Il est roux, il a des yeux verts et des taches de rousseur partout.
À le voir, on ne dirait pas qu’il descend du plus grand des manitous.
Il ne s’appelle pas « pluie des prairies » ni « loup vagabond » ni « petit d’homme »,
Comme ses parents aimaient l’acteur de « magnum », ils l’ont juste appelé Tom.
Ses ancêtres ont d’abord rencontré les Vikings, puis les Français.
Nombreux échanges commerciaux et personne ne fut massacré.
C’est les épidémies de nouvelles maladies qui les ont décimés,
Puis pires, la religion et la société qui les ont assimilés.
Tom a 20 ans aujourd’hui et il se prépare un sac à dos.
Il quitte la réserve et les siens pour des rivages plus beaux.
Il va être acteur ou rappeur, un de ces trucs qui rapportent plein d’argent.
Tout pour ne pas finir pompiste dans la station-service de ses parents.

Ici, vous ne verrez pas de tipis ni de chevaux.
La réserve c’est pavillons, mobile-homes et grosses autos.
Le pickup déglingué de son père s’approche dans l’allée,
Et Tom pousse son sac sous le lit pour bien le cacher.
Ce soir, son père ne s’affalera pas devant un match de Hockey,
Et ce n’est pas non plus la fameuse soirée karaoké.
Ce soir c’est l’une des raisons pour lesquelles Tom veut changer de vie
C’est samedi, et pour la tribu c’est soirée cérémonie.
À la sortie du quartier, dans un hangar désaffecté
Autour de son père, les anciens vont se retrouver.
Là, en essayant de répéter des chants qui n’ont jamais été écrits
Son père s’entêtera à faire croire qu’il communique avec les esprits.

Pourtant, Tom aimait bien les pow-wow quand il était plus petit.
Tout le monde lui disait comme ils étaient spéciaux, lui et sa famille.
Descendants privilégiés de la lignée des grands sorciers,
Eux seuls pouvaient entendre la nature et avec les esprits communiquer.
Petit Tom était toujours un invité d’honneur,
Et voir son père si important cela lui faisait chaud au cœur.
Mais en grandissant il du bien se confronter à la vérité :
Il n’y avait rien de mystique dans ces cérémonies et son père le savait.
La plupart des pratiques depuis longtemps oubliées,
Son père se contentait plus ou moins de les émuler,
Et pour donner le change, il a un truc pour subjuguer les foules :
Les soirs de cérémonies, son père rentre un peu plus tôt et il se saoule…

Depuis maintenant 4 ans c’est Tom qui conduit son père au hangar,
De peur qu’il n’ait un accident sur le chemin tellement il est hagard
Il voit maintenant ces cérémonies pour ce qu’elles sont vraiment :
Un rappel d’une harmonie perdue, d’un équilibre d’antan.
Mais pour lui cette pittoresque tentative de se souvenir, c’est clair,
Ça s’arrêtera en un delirium tremens avec la génération de son père.
Lui, il a d’autres attentes, il fait partie d’une autre génération,
Demain matin il prendra son sac et partira pour d’autres horizons.
Direction Montréal, Toronto, New York et puis la Californie,
À partir de demain c’est décidé, Tom change de vie.
L’enseignement du dernier shaman, nous n’en bénéficierons jamais,
Perdu ce savoir millénaire de l’équilibre naturel parfait.
Notre société y perd sa dernière chance de réapprendre le respect,
Mais bon, là-bas en Californie, une nième étoile est née…

Vers de Terre

Publié par Kanata le 22 avril 2011

Note

Les « textes à voix » comme leur nom l’indique, trouvent toute leur valeur lorsqu’ils sont parlés, et donc écoutés. Les liaisons, les élisions et leur rythme en général risquent de ne pas être retranscrits correctement par une simple lecture. C’est sans doute paradoxal pour un texte écrit, mais c’est aussi ce qui fait toute la force de la tradition orale et contée.

Description

Un autre petit défi personnel : écrire en vers qui se terminent tous par la rime “-ère”

 

Terriens, terriennes je vous verse ces quelques vers
Pour avertir quel terrible destin sévère
Verra se terminer la version de notre hémisphère austère.
D’un revers nous flanquons tout par terre,
Sans envergure ni gouvernail, altérant la nature sursitaire,
Et traitant comme balivernes ses avertissements autoritaires.
Seul critère de verdure : le billet vert,
Seule convergence planétaire : le budgétaire.
Et si j’écris ces quelques vers, de Terre
C’est pour chercher quelque part dans l’univers
Quelqu’un d’assez sage pour nous faire taire,
Nous arrêter, avant de tout foutre de travers.

Humanitaires sans-frontière et contestataires
Conversent à couvert dans les documentaires,
Tandis que militaires, terroristes et diamantaires
Déversent leur perversion à découvert.
Le calvaire héréditaire des peuples tributaires
De terrifiants gouvernements totalitaires
Déterminera à terme l’élémentaire critère :
Le monétaire, seule valeur de conversion pour ses dignitaires.
Et si j’écris ces quelques vers, de Terre
C’est pour chercher quelque part dans l’univers
Quelqu’un d’assez sage pour nous faire taire,
Nous arrêter, avant de tout foutre de travers.

Et que dire des réfractaires éternels du progrès planétaire ?
Ces dirigeants dévergondés de nos monastères
Prêchant vertu du fond de leur presbytère.
Convertissant sans vergogne dans leurs baptistères
Une diversité de cul-terreux pervers,
Alors que leur magistère interdit toute pensée pamphlétaire
Par aversion d’un mouvement communautaire
Reléguant les pensées testamentaires au rang de croyances sectaires.
Et si j’écris ces quelques vers, de Terre
C’est pour chercher quelque part dans l’univers
Quelqu’un d’assez sage pour nous faire taire,
Nous arrêter, avant de tout foutre de travers.

À chaque poison sa solution, l’adultère et le maternelle, le commanditaire et le donataire.
Opposons altercation avec conversation, excédentaire à complémentaire,
Enterrement à éternité, et ministère avec paritaire.
Supprimons les malversations avec l’interrogation et le totalitaire avec l’égalitaire.
Confrontons le gangster au vertueux, l’autoritaire au volontaire,
L’interdiction à la subversion, et le parasitaire au libertaire.
Combattons le terrorisme avec consternation, le revolver à coups de caractère,
L’adversité avec détermination et l’austère avec du mystère.
C’est bien beau et cela semble parfait,
Mais moi je n’y crois plus, je suis démotivé.
Alors j’écris ces quelques vers, de Terre
Cherchant quelque part dans l’univers
Quelqu’un d’assez sage pour nous faire taire,
Quelqu’un pour nous servir notre dernier verre.

La douche

Publié par Kanata le 14 avril 2011

Note

Les « textes à voix » comme leur nom l’indique, trouvent toute leur valeur lorsqu’ils sont parlés, et donc écoutés. Les liaisons, les élisions et leur rythme en général risquent de ne pas être retranscrits correctement par une simple lecture. C’est sans doute paradoxal pour un texte écrit, mais c’est aussi ce qui fait toute la force de la tradition orale et contée.

Description

On ne peut pas être sérieux tout le temps, non , c’est vrai quoi, la société, ça va 5 minutes, mais hé ! Avouez que c’est plutôt triste comme bilan non ?

Alors ce petit texte est un pur délire, et d’ailleurs je le dédicace à POC, le maître des délires en tout genre.

Il est courant avec ce genre de texte que l’auteur se mette à nu
Et cette fois, c’est littéralement que je vais apparaître devant vous dévêtu
Car dans ce texte je vais vous parler d’un acte qui tous nous touche
Je vais vous entretenir, vous l’aurez peut-être déjà compris, de la douche
Et à moins que vous ne soyez du genre pudique à vous laver tout habillé
Vous devrez bien convenir que c’est en général plus pratique quand on est dénudé
Alors, on a tous nos petites habitudes nos petites manies quand viennent les ablutions
Je ne fais pas exception à la règle et j’ai moi-même mes petites habitudes au fond
Je me lave dans le sens de l’eau, du haut vers le bas, avec une exception absolue
J’attends, j’exige de toujours terminer en me nettoyant le trou du …
V
ous rigolez, mais il n’y a vraiment pas de quoi, ce n’est pas le fruit de mon imagination
C’est tout de même le dernier des endroits qu’on voudrait voir se boucher et il mérite toute mon attention

Je commence donc par me shampouiner les cheveux
En prenant bien garde de ne pas m’en mettre dans les yeux
J’avoue que très tôt dans mon nettoyage, en fait dès le début
Je pense déjà à ce merveilleux instant où je vais me laver le trou du…
Mais c’est ma sacro-sainte règle, et je n’y dérogerais pas
C’est par là que je termine et en attendant je me lave de haut en bas
J’insiste sur le bas du visage, c’est important quand on est barbu
Presque aussi important que de se laver le trou du…
J’attaquerais bien le cou une fois mon visage récuré
Mais la sensation de l’eau qui coule le long de ma raie
Me déconcentre quelque peu et avant que je ne continue
Je songe de nouveau à me laver le trou du…

Je me retiens de justesse et termine de me nettoyer le cou
Puis c’est le tour des bras, des épaules et en dessous
Mais force est de l’admettre en arrivant sur mon torse velu
L’envie me reprend de me récurer le trou du …
À ce stade c’est vraiment une bataille de volonté
Je me reprends, je me calme et je continue à me laver
J’arrive à la partie la plus ventrue
Rapide pensée pour mon trou du …
Puis je m’applique à dénouer les nœuds de ma toison
Un endroit où il serait agréable de s’attarder parce que c’est bon
Mais ce n’est pas le thème du jour, ne soyons pas perdus
Pour le moment on parle bien de mon trou du …

J’en suis déjà aux jambes, il faut se baisser c’est plus ardu
Position qui irrémédiablement me donne envie de me doucher le trou du …
Je termine par les pieds, tiens faudra que je me coupe les ongles c’est griffu
Et vous l’aurez compris la prochaine étape, c’est enfin de m’occuper de mon trou du…
J’exhale, prêt à en profiter pleinement, puis je me redresse
Lentement, je passe les mains le long de mes fesses
Et enfin l’instant tant attendu
Cette fois ça y est le moment est venu
Je lève un doigt et enfin je me lave le trou du … canal auditif
Car pour moi, avoir les oreilles propres, c’est impératif.
Ben quoi, je vous sens quelque peu déçu ?
Non, gros cochons, vous pensiez que je parlais de mon trou du … ?

L’armée des stylos

Publié par Kanata le 28 mars 2011

Note

Les « textes à voix » comme leur nom l’indique, trouvent toute leur valeur lorsqu’ils sont parlés, et donc écoutés. Les liaisons, les élisions et leur rythme en général risquent de ne pas être retranscrits correctement par une simple lecture. C’est sans doute paradoxal pour un texte écrit, mais c’est aussi ce qui fait toute la force de la tradition orale et contée.

Description

Il est des textes comme ça qu’on retrouve parfois, un peu par hasard, sans trop se souvenir de quoi ils parlent, de ce qu’on avait en tête au moment de les écrire. Alors on les relit, et on tombe sur le cul ! Si seulement ce type de texte pouvait un jour ne plus être d’actualité… Mais trois ans plus tard, celui-ci l’est toujours malheureusement… Alors passé, présent ou à venir, je le dédicace à tous les penseurs qui sont tombés, mais n’ont pas courbé l’échine pour autant.



 

Dans notre armée il n’y a ni seconde classe ni officiers
Parce que dans notre armée il n’y a personne qui soit brimé ou dégradé
On écrit tous égaux en première ligne, la sueur au front
Et nos phrases claquent aux oreilles comme des explosions
On a des doux rêveurs pour nous galvaniser, des grands timides pour tout organiser
On a des penseurs pour nous donner des idées, et des extravertis pour nous libérer.
Dans le feu de l’action, on se cache parfois sous terre
Pour se protéger et pouvoir riposter à coups de vers
Mais on finit toujours par sortir de nos tranchées
Au prix d’une nouvelle phrase et d’un paragraphe barré.
Tels les soldats de la paix vous nous verrez arpenter les coins les plus hideux
Avec comme seuls signes distinctifs la clarté de nos capuchons bleus
Et même si on ne se déplace pas vraiment sur les champs de bataille
On n’en prend pas moins la haine mitoyenne en tenaille.
Cartouches en bandoulière et dans nos mains nos stylos,
L’encre coulera à flot et il y aura des mots
Car si c’est sous les coups de la DCA que les aviateurs seront tués
Nous c’est au rythme saccadé de l’ABC que prendront vie nos envolées.
Face à l’armée moderne se tournant vers les satellites pour plus de précision
Nous nous utiliserons des paraboles pour les noyer dans la confusion.
E
t même si l’on nous fait prisonniers et qu’on nous met en cage
Rien ne pourra nous empêcher de dénoncer leurs carnages
Car nos écrits résonneront plus fort que leurs cris
Et nos boucliers de vers résisteront à tous les mercenaires.

 Parce qu’à chaque guerrier, à chaque assassin, à chaque soldat
Il y aura toujours un poète pour vous faire penser ou rire aux éclats
Parce que quel que soit la portée de leurs armes
Ils ne seront jamais à l’abri du flot de nos larmes.
Parce que face à l’ennemi le plus fort
Nous aurons toujours une répartie, une métaphore.
Parce qu’aucune machette, baïonnette ou mitraillette
Ne viendra à bout d’une tête, d’un poète ou d’une quête
Parce que c’est avec la haine et la violence que l’on détruit
Mais avec la poésie et la romance que l’on reconstrui
Parce qu’on peut tuer un messager avec un canon
Mais on ne peut pas détruire son message avec une bombe à neutron
Parce qu’à tout massacre, génocide ou crime
Nous saurons faire écho ou donner une rime
Pour toutes ces raisons, quel que soit le dictateur ou le tyran,
Ils ne pourront pas gagner un combat nous opposant
Car quel que soit la force de leur armée
Ils ne pourront jamais tuer des idées.
Et si la cadence de leurs pas peut parfois en imposer
C’est la mesure de nos pieds qui ramènera toujours la paix.