L’armée des stylos
Publié par Kanata le 28 mars 2011Note
Les « textes à voix » comme leur nom l’indique, trouvent toute leur valeur lorsqu’ils sont parlés, et donc écoutés. Les liaisons, les élisions et leur rythme en général risquent de ne pas être retranscrits correctement par une simple lecture. C’est sans doute paradoxal pour un texte écrit, mais c’est aussi ce qui fait toute la force de la tradition orale et contée.
Description
Il est des textes comme ça qu’on retrouve parfois, un peu par hasard, sans trop se souvenir de quoi ils parlent, de ce qu’on avait en tête au moment de les écrire. Alors on les relit, et on tombe sur le cul ! Si seulement ce type de texte pouvait un jour ne plus être d’actualité… Mais trois ans plus tard, celui-ci l’est toujours malheureusement… Alors passé, présent ou à venir, je le dédicace à tous les penseurs qui sont tombés, mais n’ont pas courbé l’échine pour autant.
Dans notre armée il n’y a ni seconde classe ni officiers
Parce que dans notre armée il n’y a personne qui soit brimé ou dégradé
On écrit tous égaux en première ligne, la sueur au front
Et nos phrases claquent aux oreilles comme des explosions
On a des doux rêveurs pour nous galvaniser, des grands timides pour tout organiser
On a des penseurs pour nous donner des idées, et des extravertis pour nous libérer.
Dans le feu de l’action, on se cache parfois sous terre
Pour se protéger et pouvoir riposter à coups de vers
Mais on finit toujours par sortir de nos tranchées
Au prix d’une nouvelle phrase et d’un paragraphe barré.
Tels les soldats de la paix vous nous verrez arpenter les coins les plus hideux
Avec comme seuls signes distinctifs la clarté de nos capuchons bleus
Et même si on ne se déplace pas vraiment sur les champs de bataille
On n’en prend pas moins la haine mitoyenne en tenaille.
Cartouches en bandoulière et dans nos mains nos stylos,
L’encre coulera à flot et il y aura des mots
Car si c’est sous les coups de la DCA que les aviateurs seront tués
Nous c’est au rythme saccadé de l’ABC que prendront vie nos envolées.
Face à l’armée moderne se tournant vers les satellites pour plus de précision
Nous nous utiliserons des paraboles pour les noyer dans la confusion.
Et même si l’on nous fait prisonniers et qu’on nous met en cage
Rien ne pourra nous empêcher de dénoncer leurs carnages
Car nos écrits résonneront plus fort que leurs cris
Et nos boucliers de vers résisteront à tous les mercenaires.
Parce qu’à chaque guerrier, à chaque assassin, à chaque soldat
Il y aura toujours un poète pour vous faire penser ou rire aux éclats
Parce que quel que soit la portée de leurs armes
Ils ne seront jamais à l’abri du flot de nos larmes.
Parce que face à l’ennemi le plus fort
Nous aurons toujours une répartie, une métaphore.
Parce qu’aucune machette, baïonnette ou mitraillette
Ne viendra à bout d’une tête, d’un poète ou d’une quête
Parce que c’est avec la haine et la violence que l’on détruit
Mais avec la poésie et la romance que l’on reconstrui
Parce qu’on peut tuer un messager avec un canon
Mais on ne peut pas détruire son message avec une bombe à neutron
Parce qu’à tout massacre, génocide ou crime
Nous saurons faire écho ou donner une rime
Pour toutes ces raisons, quel que soit le dictateur ou le tyran,
Ils ne pourront pas gagner un combat nous opposant
Car quel que soit la force de leur armée
Ils ne pourront jamais tuer des idées.
Et si la cadence de leurs pas peut parfois en imposer
C’est la mesure de nos pieds qui ramènera toujours la paix.
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